La présidence de D.Trump fragilise-t-elle la démocratie américaine ?

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Il y a quelques mois, pour une grande majorité de médias, l’élection du milliardaire Donald Trump signifiait la mort de la démocratie américaine. Qu’en est-il réellement ? Son programme, jugé déplacé et irréalisable mène-t-il vers une destruction des valeurs démocratiques revendiquées par l’Amérique ? Jean-Baptiste Hubert, étudiant en France, nous donne son point de vue.

Donald Trump, un sursaut de démocratie en fin de compte?

10/01/2018 - 19:48
Un peu plus d’un an après l’élection qui a fait vibrer la planète entièrement, tant par le déni du résultat que par son ampleur, nous avons eu le temps de réaliser que ce n’était pas une simple mauvaise passe, pas un simple rêve dont on pourrait s’extirper le matin venu. Il s’agissait de l’arrivée d’un personnage au caractère lunatique, qui a été élu à la tête de la première puissance mondiale. Cependant, son élection ne serait-elle pas le plus formidable cadeau pour une démocratie américaine qui s’effrite?

Il suffit de comparer les promesses aux prouesses pour réaliser que le programme extrême de Trump n’était qu’un immense écran de fumée censé regrouper autour du gourou les âmes perdues par la crise et les récessions. Analysons la mesure forte de son élection, le fameux mur, qui finalement protégera les USA des envahisseurs mexicains (qui n’auront évidemment pas la bonne idée de le contourner). Et bien ce projet se résume à quelques essais isolés réalisés après appels d’offres auprès de six entreprises fin octobre 2017, avec un congrès refusant systématiquement de payer. Second point de la campagne, la réforme de l’Obamacare qui aurait dût voir ses dernières heures à peine après l’arrivée du nouveau locataire du bureau ovale. Force est de constater que malgré un congrès acquis à la cause Républicaine, le Donald ne parvient pourtant pas à faire passer sa réforme. Et cet affront va même jusqu’au blocage d’une mesure d’urgence consistant à bannir les ressortissants étrangers de sept pays musulmans, par un "simple" juge fédéral. Qui peut donc aujourd’hui s’inquiéter du futur bilan de ces quatre années étant donné l’immobilité forcée dont est victime le président? C’est bien simple, l’unique victoire de Trump est la réforme sur la fiscalité, passée le 20 Décembre dernier par 51 voix contre 57 au Sénat, réduisant le taux d’imposition général de 35 à 21%. Victoire saluée par le président lui-même sur Twitter, sur un ton qui lui est propre : "Les résultats vont parler d’eux-mêmes : des emplois, des emplois, des emplois!". Et malgré la promesse alléchante de baisses d’impôts, les américains ne le suivent pas pour autant, avec 55% d’opposants à la réforme selon CNN, les sondés indiquant que cette dernière ne s’adresserait qu’aux entreprises finalement. Trump jouait sa tête avec cette loi, et a eu recours à son ancien directeur de cabinet, John Kelly, "chargé de mener des efforts pour rétablir de l’ordre à la Maison Blanche et rassurer les responsables républicains". Sans cette aide précieuse, l’exécutif aurait eu de sérieux problème avant la fin de l’année. C’est ainsi qu’un président sans soutient clair, sans vision et sans sérieux, ne peut gouverner pleinement et en devient ainsi le président du néant.

Trump, ou le test de la démocratie

Avec un certain optimisme, l’élection de D. Trump peut même se voir comme une chance, inattendue certes, mais bien réelle qui permettrait de tester la démocratie américaine. En effet, si un impulsif grossier parvenait à lui seul, à déstabiliser l’ensemble du régime Américain, là l’angoisse serait légitime. Quand bien même le cercle médiatique s’est complétement effondré devant cet extraterrestre de la politique, il est tout de même remarquable de constater qu’il n’en est rien concernant les institutions. Quand le congrès, qui est allié du président refuse de lui accorder sa réforme, l’espoir revient. Le système de "check and balances" va lui aussi être mis à l’épreuve. En effet, Trump a réussi à prouver à tout le monde qu’il n’a pas l’étoffe d’un président malgré tout son succès: le congrès et les juges fédéraux font maintenant office de président par intérim. C’est eux même qui sont à l’origine des lois (le fait de faire intervenir John Kelly dans la dernière réforme fiscale est issu du camp Républicain et non du président). Et pour l’instant, le système tient bon, l’échec du remplacement de l’Obamacare montre qu’on ne gère pas les USA comme une entreprise. Trump n’est plus dans son show "The Apprentice", où la loi n’émanait que de lui. Non, le travail de persuasion que doit mettre en place le président auprès des institutions a été bafoué et c’est ainsi que l’ensemble des appareils démocratiques se sont retournés contre lui. Mais les sénateurs et députés ne sont pas aussi bornés que le président et se rangent du côté du Trump (Démocrate comme Républicain) sur la question Israélienne, avec par exemple Eliot Engel, démocrate de la commission des Affaires étrangères, indiquant que cela permettra de "corriger une indignité qui dure depuis des décennies". Le débat démocratique sur cette question épineuse ne se limite pas qu’aux frontières américaines puisque jeudi 30 décembre a lieu un vote de l’ONU condamnant l’action des Etats Unis. Sur 193 participants, le vote pourrait rassembler jusqu’à 180 voix. Il est ainsi notable que la communauté internationale ne se laisse pas impressionner par l’arrogance américaine, promettant de "noter les noms" des votants, et qu’en fin de compte, l’impulsivité du président n’empêche en aucun cas le débat et le vote. C’est pourquoi ces années sous le gouvernement Trump pourraient bien s’avérer essentielle pour mesurer la force de nos institutions, et nous poser les bonnes questions sur notre rôle dans tout cela.

Notre rôle

Dans un monde de plus en plus globalisé, il s’avère que Donald Trump est certes le président des américains en premier lieu; mais le rôle du président de USA est également d’être une figure de proue de la paix et de la sécurité mondiale et ce depuis des décennies. C’est pourquoi, le débat autour de sa présidence ne concerne pas seulement les citoyens américains mais bien l’ensemble des individus souhaitant préserver une harmonie mondiale. Le Donald n’en fait qu’à sa tête, réforme après réforme, échec après échec, il persiste. Cet entêtement, quasi symptomatique, Enstein nous aide à le comprendre : "La définition de la folie, c’est de faire toujours la même chose, et d’attendre des résultats différents". Cessons de se prêter à son jeu répétitif et libérons-nous de son emprise en pensant déjà à demain. Arrêtons de faire les victimes, après tout c’est bien le peuple qui l’a élu et sa légitimité ne peut être remise en question (affaire des informations russes exceptée) et une fois le déni et la colère passés, revenons à une analyse plus fine de ce qu’a vraiment apporté cette élection. Un sursaut de démocratie, oui. A peine le président fût-il élu, que des vagues de soutient à toutes les causes opprimées se sont soulevées à travers le monde. Des banderoles, des post, des articles, des reportages, des twittes, on citera le fameux "Make our planet great again", trôlant le président et toute sa démarche de campagne, et même des manifestations ont vu le jour pour défendre l’ensemble des principes (bafoués ou non) qui servent de fondation à notre démocratie moderne. Ce fût notamment le cas lors que le locataire de la Maison Blanche a eu la bonne idée de supporter un ancien responsable du KKK candidat au Sénat américain, David Duke. Des marches défendant l’égalité de tous ont alors vu le jour un peu partout en Louisiane.


A vouloir sans arrêt choquer par ses réformes d’un autre monde, on se demanderait presque si l’inconscient de Trump ne le pousserait pas à agir de la sorte pour remobiliser l’esprit démocratique. C’est finalement là où est le cœur du problème. Qu’un homme dépourvu de bon sens soit élu n’est en soit pas une tragédie démocratique, mais plutôt le fait que malgré tous les signes annonciateurs de sa proche venu, personne n’ai réagi. Orsenna disait "Rien n'est jamais acquis, et on doit veiller toujours, jusque dans le repos.", il en est de même avec notre régime que nous chérissons tant. Se reposer sur la participation d’autrui pour sauver notre propre intérêt est une chose, s’en plaindre par la suite est de l’hypocrisie. Et cela est de nature à nous servir, nous citoyens Français, dans ces temps difficiles ou l’incertitude est la norme. Dans un climat incertain, nous devons rester confiant en nos institutions, qui sont elles aussi fortes, et ne pas se laisser amadouer par les extrêmes qui nous tendent les bras, car je ne sais pas pour vous, mais je ne souhaite pas assister à la longue représentation théâtrale qui a lieu de l’autre côté de l’Océan, et ce pour trois années supplémentaires.

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

La menace réelle d’une présidence anti-démocratique

02/02/2018 - 13:49
Donald J. Trump est né dans un autre monde : son dur labeur, sa persévérance mais surtout son riche père l’ont rapidement propulsé dans la haute société américaine. Passant d’une carrière financière houleuse à une téléréalité grandiloquente, le projet de retraite de Trump semblait forcément voué à consister en une course pour la présidence des Etats-Unis. Menant bravement une guerre contre les Clinton et les Bush, "Ted le menteur" et autres "petit Marco", se fondant sur sa politique migratoire, sa réforme fiscale et ses grandes mains, il a brillamment perdu le vote populaire à son adversaire et a gagné le droit de s’assoir dans le Bureau ovale.

Après une année entière de ce numéro de cirque ridicule, le président semble ne s’être pas seulement révélé incompétent, mais réellement dangereux pour le cœur même de la démocratie américaine.

Une présidence post-campagne décevante

Très peu de choses parmi les promesses de campagne de Trump pouvaient raisonnablement être appliquées; sans surprise, presque aucune de ses promesses ne le fut. Mettre en place une réforme des impôts qui enrichirait les riches, déplacer l’ambassade de Tel-Aviv à Jérusalem sans aucune considération pour les consensus internationaux, se retirer de l’accord sur le climat le plus avancé de l’histoire: voilà trois promesses que Trump peut sortir de son agenda avec une conscience tranquille. Mais ce qui a motivé ses électeurs encombre encore la "to-do list" du président. Le "Muslim Ban" a été réduit à la simple interdiction d’entrée aux Etats-Unis de ressortissants de 6 pays à majorité musulmane; les 11 millions d’immigrants n’ont pas été déportés; les Etats-Unis ne se sont pas retirés de l’OTAN. Le mur à la frontière avec le Mexique, long de 1600 kilomètres, haut de 9 mètres et coutant 18 milliards de dollars n’est pas près de voir la lumière du jour, si on oublie encore le pays qui va le financer. Cette liste raccourcie des promesses non-tenues de Trump se reflète parfaitement dans la masse immense des électeurs déçus, qui se répercute sur le taux de désapprobation le plus élevé de l’après-guerre. Un seul mot suffit à décrire l’action de Trump envers le peuple américain: mensonge. La démocratie repose sur la confiance qu’un électeur met dans le candidat qui se rapproche le plus de ses idées, et un candidat qui a juré combattre l’inertie et la paralysie de Washington ne peut se permettre de décevoir ses électeurs en ne devenant qu’un autre politicien stagnant mais néanmoins agité. Ceci est la première menace que Donald Trump représente pour la démocratie.

Une présidence égocentrique

En tentant de comprendre la mentalité de Trump et sa psyché complexe, on pourrait prudemment avancer qu’il "pourrait" être un brin arrogant et prétentieux. L’estime de soi et l’assurance sont des qualités nécessaires à tout chef, mais elles deviennent dangereuses lorsqu’elles se transforment en prétention. De ce fait, l’opposition et l’adversité sont surement les pires cauchemars de Trump. Il est par exemple vrai que les médias "mainstream" et libéraux n’y sont pas allés de main morte avec le président (une étude de Harvard démontre que la couverture médiatique des 100 premiers jours de Trump a été négative à plus de 90% sur CNN et NBC). Tout de même, il n’est pas acceptable de les traiter en représailles "d’ennemis du peuple américain" et de provoquer régulièrement les gens qui tentent simplement d’informer et de former l’opinion des citoyens américains. Dans une affaire bien plus grave, lorsque les services de renseignement américains enquêtaient sur une possible collusion entre l’équipe de campagne de Trump et la Russie, le président a licencié le directeur du FBI James Comey, en avançant des arguments obscurs. Aussi révoltant que cela puisse paraitre, le pire s’est manifesté lorsque Comey s’est exprimé sur les demandes implicites du président de laisser tomber l’enquête. Commenter ces faits serait futile: Trump s’est méthodiquement appliqué à détruire toute entrave sur son chemin, ainsi qu’à considérer tout opposant politique normal comme un ennemi absolu devant être brisé. Ceci est la deuxième menace que Trump représente pour la démocratie.

Un agitateur irresponsable

Donald Trump a prouvé qu’il ne pouvait pas tenir la parole qui l’a propulsé au pouvoir. Il ne peut supporter aucune sorte d’opposition et a manifesté son hostilité envers les institutions américaines les plus respectées. Mais Trump ne n’est pas stoppé, et ne va pas s’arrêter là. Il a atteint un point inégalé dans l’histoire des Etats-Unis d’Amérique. Il a souillé la démocratie d’une manière qui ne pouvait être imaginée dans un Etat libre.
Donald J. Trump a adopté une position alarmante face à la violence. Laissons de côté sa campagne, lorsqu’il a appelé ses supporters à "casser la gueule" à des perturbateurs potentiels sans se soucier des frais légaux qu’il allait assurer, ou lorsqu’il n’a jamais ouvertement dénié le soutient du Ku-Klux-Klan. Quand il est entré en fonctions, plusieurs évènements violents, comme des attaques sur des cliniques d’avortement, ou encore des agressions à motivations raciste ou sexiste ont eu lieu, sans aucune prise de position de sa part. Cette tendance dangereuse a culminé durant les évènements d’août dernier à Charlottesville, où des affrontements violents entre suprémacistes blancs et contre-manifestants ont résulté en plusieurs blessés et un mort après qu’un nationaliste blanc ait foncé dans la foule avec sa voiture. La réponse du président a été extrêmement faible; pour une raison inconnue il a condamné la violence de "plusieurs côtés", et c’est seulement deux jours plus tard qu’il a daigné condamner le racisme qui avait motivé le meurtrier. Dans un pays démocratique, un tel comportement n’est simplement pas acceptable, et ceci est la troisième et certainement la plus grande menace pour la démocratie.

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

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