Interdiction du Parti national-démocrate, NPD : chances politiques et risques juridiques

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Fondé en 1964 à partir de deux anciennes formations néo-fascistes, le Parti national-démocrate d’Allemagne inquiète, non pour ses scores électoraux mais parce que l’activité de groupes d’extrême-droite qui lui sont liés plus ou moins officiellement a fait ces dernières années un important retour dans l’actualité.

Demande d’interdiction du Parti national-démocrate: une succession d’obstacles

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26/01/2013 - 18:48
La jurisprudence de Karlsruhe s’applique-t-il au Parti national-démocrate, dont l’influence est faible ? Un passage devant la Cour constitutionnelle fédérale ne lui offrirait-elle pas une trop grande visibilité ?

Au début des années 2000 déjà, le gouvernement fédéral de l’époque, le Bundestag et le Bundesrat avaient déposé une demande en vue de la constatation judiciaire de la violation de la constitution par le Parti national-démocrate, NPD (Nationaldemokratische Partei Deutschlands) et, partant, de la dissolution de ce dernier. La procédure d’interdiction échoua toutefois en mars 2003 devant la Cour constitutionnelle fédérale – la raison en fut l’infiltration à l’intérieur de sections fédérales et régionales de cette formation par des informateurs de l’office de protection de la constitution. Ainsi, la transparence et l’admissibilité de l’action en justice n’étaient plus garanties pour les juges, puisque la distinction n’était pas évidente entre les déclarations provenant de membres du NPD et celles livrées par des agents que l’on appelle les . Même si Karlsruhe n’était pas convaincu de la fidélité à la loi fondamentale de la part du NPD, tout le processus représenta une importante humiliation dans l’histoire de la démocratie allemande.

Si l’allégation, désormais bien turbulente, venait à être à nouveau refusée par la Cour constitutionnelle fédérale, cela pourrait présenter de sérieux dommages – quand bien même la non-existence du NPD serait souhaitable.

Doutes vis-à-vis de la l’applicabilité juridique de l’interdiction du NPD

Avec, précisément, l’expérience allemande du national-socialisme en toile de fond, la loi fondamentale manifeste de très hautes exigences en matière d’interdiction d’un parti – pour que les événements du passé ne se reproduisent plus. C’est ainsi qu’une telle interdiction de mouvement politique n’eut lieu qu’à deux reprises depuis la fondation de la RFA : ce fut le cas du parti socialiste du , formation d’extrême-droite, et en 1956 du KPD (parti communiste). 

À l’époque, les juges de Karlsruhe donnèrent comme motif l’attitude hostile à la constitution de ces deux partis. Il est pourtant plus que probable que, pour une interdiction de la sorte, le seuil se situe aujourd’hui considérablement plus haut qu’au cours des années 1950 et que, par conséquent, la possible demande d’interdiction du NPD soit instruite de manière plus stricte. Une difficulté supplémentaire réside dans le fait qu’une majorité des deux tiers est requise en matière d’interdiction d’un parti, ce qui correspond concrètement au suffrage de six des huit juges de Karlsruhe.

“Grand show” pour le NPD

Une demande d’interdiction correspond donc à un véritable défi juridique. Mais c’est justement ce fait qui pourrait conduire, dans la mesure où les organes politiques compétents auraient tout de même le courage de cette démarche auprès de Karlsruhe, à ce que le NPD puisse bénéficier d’un nouvel essor au cours de l’année électorale 2013.

Il est en effet hautement probable qu’un procédé d’interdiction se traîne pendant des mois, si ce ne sont même des années. Le parti d’extrême-droite, qui se trouve actuellement en piteux état, ne pourrait s’imaginer nulle meilleure scène publique et pourrait ainsi largement profiter des feux des projecteurs médiatiques – une seule et unique fois, en effet, au cours de son histoire longue de quarante ans, le NPD a atteint un score supérieur à un pour cent lors des élections législatives fédérales : en 2003, après l’échec de la démarche d’interdiction à son encontre ! Il faut de surcroît prendre en compte la question de l’efficacité d’une telle interdiction : devrions-nous pas, dans l’hypothèse d’un succès devant la Cour constitutionnelle fédérale, compter avec le fait qu’un nouveau parti d’extrême-droite verrait le jour assez rapidement ? Dans quel mesure aurions-nous alors, en fin de compte, porté atteinte à ces milieux ? Et, d’un autre côté, dans d’autres pays, comme par exemple justement en France, l’aile de la droite radicale parvient à des scores autrement plus significatifs qu’en Allemagne.

La dernière instance

L’obstacle principal compliquant le procédé, pourtant, réside encore ailleurs, à savoir à Strasbourg, et plus exactement auprès de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). Celle-ci remet en question la menace qui serait représentée pour l’État allemand par le parti en question et se demande si une éventuelle interdiction serait une réaction proportionnée à cette menace. Au regard des résultats électoraux peu élevés du NPD pendant ces dernières années, le dépôt d’une plainte de la formation d’extrême-droite devant la CEDH pourrait largement être couronné de succès – d’autant plus que les juges européens appliquent des critères bien plus élevés dans le cas d’une interdiction que parti que Karlsruhe ne le fait. Ils agissent entièrement selon un principe directeur : ce qui est insignifiant ne peut pas non plus être classé dans la catégorie des menaces.

Une discussion au sein de la société dans son entier est nécessaire

Pourquoi, donc, tentons-nous d’accorder la moindre importance à cette formation ?Interdire n’est-il alors pas, dans une large mesure, céder à la facilité ? La question st la suivante : une interdiction du NPD fait-il avancer l’Allemagne ? L’exclusion du financement public de partis ayant prouvé leur hostilité à la constitution ne serait-elle pas bien plus riche de sens ? Ou bien encore : le pays ne devrait-il pas sich se comporter d’une façon bien plus politique avec ce parti ? Ne serait-ce pas la méthode la plus efficace pour réfuter ses arguments d’extrême-droite ?

Parce que l’idéologie national-socialiste ne se laissera vraisemblablement pas retirer des têtes de ses partisans du jour au lendemain. Malheureusement.

 

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

Il est temps d’en finir avec le Parti national-démocrate

26/01/2013 - 18:48
L’Allemagne, tant en raison de son histoire que parce qu’elle est un modèle pour l’Europe, ne peut se permettre de conserver un le Parti national-démocrate actif sur son sol : elle doit utiliser ses dispositions légales pour l’interdire.

L’actualité nous montre – et ceci est particulièrement vrai en temps de crise économique et sociale – que la menace du populisme n’est pas aisée à écarter pour de bon. En Europe, de nombreux exemples de formations politiques à l’idéologie réactionnaire et raciste parviennent à rassembler les voix d’un nombre non négligeable de citoyens : Front national en France, Ligue du Nord en Italie, Aube dorée en Grèce, Parti pour l’indépendance au Royaume-Uni, Union démocratique du centre en Suisse.

En termes purement électoraux, le Parti national-démocrate d’Allemagne, qui a pendant des décennies alterné entre de dangereuses phases de succès et des périodes de quasi-disparition, n’atteint plus depuis longtemps des scores comparables à ses équivalents étrangers. Pourtant, il est souhaitable, urgent et légal que cette formation soit frappée d’interdiction.

Un inacceptable double-jeu

Pourquoi s’inquiéter si le parti n’a que si peu d’élus ? Parce que, bien cachés derrière le discours des dirigeants du parti (http://www.npd.de/html/1939/artikel/detail/2070/) – “ce n’est pas aux étrangers mais à l’immigration que nous sommes opposés”, “[le parti] refuse la violence comme moyen d’expression politique” –, l’activité de groupuscules terroristes secrets d’extrême-droite est loin d’avoir disparu : on se souvient encore des récents meurtres commis par la .

Sans atteindre de tels niveaux dans le crime, le milieu d’extrême-droite est très actif dans certaines régions d’Allemagne. C’est notamment le cas dans les Länder issus de l’ancienne République démocratique allemande, où le chômage élevé et l’arrivée somme toute plus récente que dans le reste du pays d’une population d’origine émigrée sont des facteurs décisifs. Un tel climat social conduit certaines personnes, particulièrement de jeunes hommes, à se faire partie de groupes commettant des actes violents, et, bien souvent, à orientation anti-étrangère. On observe, assez régulièrement, des manifestations au cours desquelles se font face une trentaine de néo-nazis et une centaine de militants anti-fascistes, l’ensemble étant cerné d’au moins autant de policiers.

Sans réelles convictions politiques, ces individus se laissent néanmoins influencer par des formations populistes, d’autant plus qu’un discours tendancieux, à la limite du racisme et de l’antisémitisme, s’est développé même dans les cercles apparemment les plus modérés, avec par exemple la publication des ouvrages de Thilo Sarrazin, dont L’Allemagne court à sa perte, brûlot attribuant une grande partie des maux du pays aux immigrés.

Des mécanismes originaux et efficaces

Ce n’est pourtant pas comme si l’Allemagne ne s’était pas dotés d’outils inédits pour lutter contre de telles mouvances, clandestines ou publiques. D’une part, il existe un Office de protection de la constitution et, d’autre part, la Cour constitutionnelle fédérale peut être saisie dans le but d’interdire un parti, ce qui a déjà été le cas à deux reprises.

Au sein de mouvements politiques faisant l’objet de soupçons d’hostilité à la constitution de la part des organes politiques sont infiltrés des agents-espions. Ces derniers jouent le rôle de taupe en faisant semblant de militer au sein de ces partis pour ensuite livrer des informations aux autorités publiques en charge de les combattre. Ces techniques de surveillance ne sont pas aussi efficacement organisés dans d’autres pays, l’Allemagne doit en profiter, ce qu’a bien raison de souligner le chrétien-démocrate Jörg Geibert, ministre de l’intérieur du Land de Thuringe.

L’article 21 de la loi fondamentale allemande, qui traite des partis, est d’une formidable clarté ; sa fermeté prouve la clairvoyance de ses rédacteurs, le champ de ses possibilités d’interprétation leur pragmatisme : “[...] Leur organisation interne doit être conforme aux principes démocratiques. [...] Les partis qui, d’après leurs buts ou d’après le comportement de leurs adhérents, tendent à porter atteinte à l’ordre constitutionnel libéral et démocratique, ou à le renverser, ou à mettre en péril l’existence de la République fédérale d’Allemagne, sont inconstitutionnels. La Cour constitutionnelle fédérale statue sur la question de l’inconstitutionnalité.”

Or, si l’on reprend les différents points de ce paragraphe, l’on ne peut que constater , premièrement, qu’effectivement le NPD représente une menace pour l’essence des l’ordre fondamental, et, deuxièmement, en consultant les propositions de modification du régime politique qu’il émet, que ces derniers ne sont pas sans rappeler ceux opérés par Adolf Hitler rapidement après son accession à la chancellerie en janvier 1933.

Une question de courage

La triple demande d’interdiction lancée en 2001 à la fois par le gouvernement fédéral, les deux chambres du Parlement fédéral, c’est-à-dire le Bundestag et le Bundesrat, ainsi que la Cour constitutionnelle fédérale, avait traîné jusqu’en 2003 et s’était soldée par un rejet. Nous sommes d’avis qu’une nouvelle procédure serait maintenant possible, légale, légitime et nécessaire, mais les membres du cabinet Merkel ne sont aujourd’hui pas capables de parler d’une seule voix, ce qui est profondément regrettable.

Il faut d’ailleurs noter que, selon des sondages rendus publics par ARD (la première chaîne de télévision publique en Allemagne) et l’institut Forschungsgruppe Wahlen, plus des trois quarts des personnes interrogées sont favorables à une mesure d’interdiction du NDP, qui a entre temps fusionné avec le DVU (l’Union du peuple allemand=DVU, Deutsche Volksunion). On le voit aisément : ceux argumentant, à l’instat d’Annette Schavan, ministre fédérale de l’enseignement ou bien du libéral Wissing que marginaliser le parti pourrait le rendre plus fort manquent clairement de bravoure et de sens du respect de la volonté populaire.

 

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