Les résultats des élections européennes en France : un « vote sanction » ou « eurosceptique » ?
Pas une sanction aveugles des élites françaises mais un jugement éclairé sur l’Europe !
On a fait miroiter l’image d’une Union Européenne à toute épreuve, bastion de stabilité, d’égalité et de prospérité qui devait permettre au continent de garder une importance de premier plan au sein de la mondialisation. La déception est à la hauteur des rêves : chômage, inégalités, diminution de la richesse, perte d’influence sur les évènements du monde... L’UE a non seulement démontré son incapacité à gérer la situation mais elle a considérablement réduit les moyens d’action au niveau national par des lois communautaires qui étouffent un système déjà pris au piège. L’Europe a été impuissante face à la désastreuse crise grecque et espagnole. Avec maintenant un des déficits publics les plus fort d’Europe, les français craignent à juste titre d’être les suivants sur la liste.
Un programme qui répond aux angoisses du moment
Le programme de Marine Le Pen répond aux inquiétudes par des principes simples qui garantissent un changement radical, par la victoire de l’ordre sur le chaos. Il profite aussi de l’affaiblissement du Parti Communiste. Par un discours beaucoup moins nationaliste qu’avant et ne prônant plus la fermeture des frontières, le PC est devenu un parti comme les autres. Il n’est plus vu comme une alternative. Par ailleurs, le point phare de ce programme est l’opposition à l’ouverture des frontières. Face à des propositions économiques peu claires et à géométrie variable, c’est donc bien la peur de l’Europe, la peur de son extension et la peur des autres qui domine…
La preuve par l’analyse des résultats
Alors que le nombre de sièges à gauche et au centre est resté à peu près stable, le nombre de sièges écologistes a diminué de moitié tandis que le nombre de sièges à droite a diminué d’un tiers. En parallèle le nombre de sièges attribués au FN a été multiplié par 6 par rapport aux dernières élections en 2009 ! Comment expliquer la débandade soudaine des écologistes si ce n’est par la perte de confiance en l’Europe ? Ils ont pourtant été les bons élèves du Parlement Européen. Seul parti français à être présent et actif dans les Commissions, les Verts ont eu une réelle influence sur la politique environnementale européenne. Leurs supporters ont malgré tout rejoint les 43 % d’abstentionnistes. Quant à la droite libérale, elle ne croit plus au rôle de la France en Europe depuis la fin du couple de feu Sarkozy-Merkel. Leurs supporters rejoignent les désabusés qu’ils aient opté pour Marine ou pour l’abstention. Si l’on excepte une partie des votes de droite qui s’est peut être radicalisée, le bond spectaculaire du FN s’explique surtout par une majorité d’électeurs qui se sont déplacés pour la première fois aux urnes européennes… pour voter eurosceptique.
Un mouvement plus général en Europe
Les slogans de Marine tels que « la préférence nationale » ou « les nationaux d’abord », ne sont pas clamés seulement en France. Dès les années 1980 le Parti du Progrès en Norvège a lancé la mouvance. Il est le précurseur d’une nouvelle forme d’extrême droite qui n’a plus rien à voir avec les nostalgies de la deuxième guerre mondiale : une nouvelle forme d’exaltation de l’Etat-Nation en opposition à un pouvoir supranational. Alors que des partis très liés à un passé fasciste perdent en audience, des partis travaillent au changement de leur image grâce à un discours qui se veut moins radical et normalisé, tel que celui de Marine Le Pen. Ces nouveaux partis d’extrême droite se présentent comme des alternatives aux partis libéraux conservateurs qui ont déçu. Mais en prônant le repli sur soi, ils sont surtout le reflet de la peur de la mondialisation et de la nouvelle complexité du monde, en particulier face aux problèmes économiques. La consolidation d’une identité européenne commune nous aidera à surmonter ces peurs. Mais pour installer une confiance durable, il faudra d’abord prouver que l’Europe peut surmonter les crises…
Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.
L’échec de la classe politique française
Plus d’un électeur sur deux ne s’est pas déplacé et 25% des suffrages se sont exprimés en faveur du Front National... En apparence, le projet européen essuie un violent camouflet au pays de Schumann et de Delors avec la nette victoire du grand parti le plus eurosceptique de son échiquier politique. En apparence les élections européennes de 2014 marquent un rejet de l’Europe au sein de la population française mais pourtant...
Une défaite en trompe l’œil
Qui regrette aujourd’hui que les conflits interétatiques armés en Europe de l’Ouest aient disparu depuis la concrétisation du projet européen ? Personne. Combien de français regrettent de ne plus patienter aux frontières lorsqu’ils se rendent dans un autre pays de l’Union Européenne ? Assez peu. Combien d’agriculteurs ont-ils survécu ou pu se développer grâce à la PAC qui permet à la France d’être l’une des agricultures les plus productives du monde ? Beaucoup. Combien de Français qui connaissent ERASMUS, mais n’ont pas participé au programme, auraient souhaité le faire ? Près de 8 sur 10 selon un récent sondage TNS SOFRES.
L’incompétence des « europtimistes »
En réalité les élections européennes de 2014 ne marquent pas l’échec de l’Union mais bien celui de la classe politique française, incapable de résoudre les problèmes qui s’imposent à elle depuis la crise économique de 2008. Au pouvoir depuis plus de deux ans, le Parti Socialiste en porte logiquement le fardeau, avec une cote d’impopularité record, que le récent changement de gouvernement n’est pas parvenu à endiguer. Dans l’opposition, le grand parti de droite, l’UMP est englué dans une guerre des chefs sans fin depuis la défaite de Nicolas Sarkozy aux élections présidentielles de 2012 et miné par des scandales à répétition. Parmi les europhiles, les centristes de l’UDI viennent de perdre leur chef Jean-Louis Borloo tandis que le parti écologiste EELV est miné par d’interminables luttes intestines. L’expression « vote sanction » prend toute sa pertinence quand on observe le marasme. Elle montre que les Français désapprouvent bien davantage la politique de « l’UMPS » (pour reprendre la trouvaille communicationnelle du FN) et l’absence d’alternative pro-européenne qu’ils ne condamnent les institutions communautaires.
Le manque de courage des gouvernants
Malgré tout, il est nécessaire de rester honnête et de rendre aux eurosceptiques ce qui appartient aux eurosceptiques : par les temps qui courent, l’Union européenne n’est que peu appréciée en France. Pourquoi ? Plus que dans une volonté de repli sur soi, la réponse est à trouver dans le manque de courage politique des partis dominants. Bruxelles, sa Commission et ses « technocrates » sont devenus les boucs émissaires utiles aux gouvernants nationaux. Ils leurs permettent concrètement de se défausser de leurs échecs et endossent la responsabilité de mesures impopulaires prises conjointement par les Etats. A Paris comme à Londres et ailleurs en Europe, ce sont les errements des partis politiques qui se prétendent les plus « europtimistes » qui ont été rejetés. Les résultats des élections européennes de 2014 marquent, en France, davantage « un vote sanction » qu’un vote « eurosceptique ».
Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.
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