Les médecins slovaques ont-ils abusé de leur pouvoir ?

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Le gouvernement slovaque a déclaré l'état de crise, forçant ainsi les médecins, y compris les grévistes, de reprendre le service. Aurait-il ainsi dépassé ses pouvoirs? Etait-ce un acte légitime que de vouloir mettre fin à tout prix à la crise sans précédent des soins médicaux ?

Les médecins, preneurs d’otage de la Slovaquie

25/01/2013 - 13:52
La société slovaque a connu un traumatisme sans précédent des soins médicaux, à cause des revendications incongrues des syndicats et de l’incapacité à agir du gouvernement provisoire. Le refus catégorique des médecins à travailler a mené jusqu’à la déclaration de l’état de crise. Contre une pareille mise en danger générale par les médecins spoliateurs, des moyens préventifs sont en train d'être développés.

Dès le début de l'année 2011, les syndicats de médecins menaçaient le gouvernement d’organiser une grève générale. La montée des tensions a abouti à une situation de crise nationale quand près d'un quart des médecins ont annoncé leur démission. Les négociations ratées sont interprétées comme un échec du gouvernement entier, consommé par des crises intérieures successives. Ainsi, le gouvernement a gravement sous-estimé la détermination des syndicats. La situation était d'autant plus difficile à régler que depuis le mois d’octobre le pays n'a qu'un gouvernement provisoire avec des compétences limitées. Malgré une volonté de négocier, les exigences excessives et les manières agressives des syndicats ont été condamnées par l'ensemble de la société, dans le contexte de coupures budgétaires importantes dues à la crise économique Même si le gouvernement a cédé finalement, les médecins ont emporté une victoire à la Pyrrhus.

Les d'exigences démesurées mettant en en jeu de la vie des patients

Les médecins slovaques ont été largement inspirés et encouragés par le succès de leurs homologues tchèques – qui à la place de la grève « ordinaire » ont préféré les dépôts massifs de démissions. En Slovaquie, le départ déclaré d'à peu près 2400 médecins sur les 12 000 en Slovaquie a entraîné la remise en question du système médical tout entier. Les exigences des syndicats en terme de hausse des salaires étaient évidemment irréalisables. Avec un déficit de 4,9 % du PIB et la perspective d'une croissance de seulement 1,1 pour l'année prochaine, c'est une politique d'austérité qu'on annonce. De plus, les revenus moyens perçus par les médecins (1 600 €) représentent le double du salaire moyen en Slovaquie (760 €), également le standard des pays de l'Europe de l’ouest. C'est pourquoi la légitimité de la grève était discutable, notamment après la concession majeure du gouvernement, c’est-à-dire l'arrêt du processus de transformation des hôpitaux en établissements privés. Compte tenu du fait que 2/3 des Slovaques perçoivent un salaire inférieur au salaire moyen (!), les demandes de hausse à un niveau équivalent à 3 fois le salaire moyen paraissaient scandaleuses. D'autant plus que M. Kollár a proposé que cette hausse soit financée au détriment du rachat de nouveaux équipements médicaux.

«Le chantage des médecins mal perçu par la population slovaque»

L’intransigeance des médecins, sourds aux compromis gouvernementaux, et l’état général du pays, encore dégradé par la chute du gouvernement, ont débouché sur la déclaration de l'état de crise. Le président l'a déclaré la veille de l'expiration de la période de l'ultimatum, période pendant laquelle le gouvernement a essayé d'éviter le départ des médecins et de les obliger à se remettre au travail Cette mesure illustre en elle-même l'urgence de la situation, tout comme la convocation des médecins d'armée tchèques enfin de minimiser des incidences fatales sur la population. Pourtant, la majorité des médecins n'a pas craint d'ignorer l'état de crise déclaré et les obligations qui en découlent. Sous prétexte d’avoir pris des congés maladie, ils ont refusé de fournir tous soins médicaux. Ainsi, même si les Slovaques se sont montrés initialement favorables aux efforts des syndicats, l'opinion publique s'est retournée contre les actions nuisibles à l'intérêt général organisées par les médecins. Cette prise en otage de la santé, de la vie même des citoyens est incomprise, d'autant plus que les médecins justifient leurs revendications par la spécificité de leur métier. Est-ce que cette position vraiment spéciale, le fait qu’ils soient indispensables, les excuse ? N'est-ce d'autant plus scandaleux d’utiliser ce besoin de la société slovaque d'avoir accès à la santé et donc à des professionnels pour voir ses exigences acceptées ?

Une protection de la sécurité publique supérieure aux revendications individuelles et individualistes

Le dénouement de l'affaire peut être vu comme une véritable victoire à la Pyrrhus des médecins. L'opinion publique, qui a radicalement changé depuis le début de l’affaire, serait alors aujourd’hui favorable à une gestion musclée de crises pareilles par le gouvernement. En effet, elle semblait commencer à se demander où la violence des syndicats allait mener le pays. Pas nécessaire d'aller loin pour trouver une réponse : la Grande Bretagne pré-thatchérienne, constamment paralysée par les grèves et la toute-puissance des syndicats en est une belle illustration. La société ne serait-elle à l'avenir paralysée par les grèves successives si chaque corporation se comportait de la même manière ? Car les médecins n'ont pas plus de légitimité à protester que les autres fonctionnaires, la santé étant loin d'être le seul secteur sous-financé par l'Etat : l‘éducation (3,69% du PIB contre 4,98 % de la moyenne européenne) ou la recherche (0,46 % du PIB contre 1,83% de la moyenne européenne) manquent également cruellement de fonds publics.

Ainsi, une infraction nouvelle à la loi sera définie – le manquement à ses devoirs dans l'état de crise. Cette nouvelle mesure s’insère dans le cadre de la loi constitutionnelle déjà existante qui limite le droit de grève des certains groupes enfin de préserver la sécurité publique, dans ce contexte notamment afin de préserver la santé des Slovaques. Car l’intérêt général est supérieur aux revendications d'un quelconque groupe de pression. S'il résulte d'une grève une mise en péril de la santé, voire de la vie des citoyens, le gouvernement, dans sa nouvelle réforme, se donnera l'autorisation de mettre fin au mouvement afin de permettre à sa population d'accéder aux soins médicaux. Enfin, malgré la concession du gouvernement sur les salaires, l'autre effet pervers de la persistance des syndicats est l'envie des hôpitaux d'accroître le nombre de contrats avec les médecins ukrainiens au détriment des médecins slovaques. Car tandis qu‘on observe depuis des années la fuite des cerveaux slovaques vers la République tchèque, le même phénomène vient d‘apparaître avec un afflux de médecins ukrainiens en Slovaquie. Prêts à travailler pour des salaires slovaques de rêves, ils vont désormais priver les médecins slovaques d’emplois, ou au moins de la capacité à faire pression.

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

Les médecins, victimes de la Slovaquie

25/01/2013 - 13:52
Les derniers retentissements de l'affaire des grèves des médecins témoignent d'une grande faiblesse de la démocratie en Slovaquie. Les élites politiques dépourvues de la culture de négociation ont provoqué les syndicats jusqu'à l'extrême. Non content d'avoir manqué de respect aux médecins et d'avoir failli à ses engagements, le gouvernement slovaque s’apprêtait à bafouer leurs droits fondamentaux.

Le 16 décembre, aussitôt après la signature d’une loi conforme aux exigences de la majorité, les médecins mirent fin à leur grève. Ces derniers avaient déjà souhaité en début d’année alerter le ministre Uhliarik1 du mauvais état du système. Néanmoins, son attitude impassible face à ces revendications a entraîné une radicalisation des actions de protestation. Ces actions ont culminé par l’envoi de préavis de licenciement massifs de la part des médecins. Ainsi, les autorités slovaques ont montré leur incapacité à mener de paisibles négociations, qui est à l'origine de l'effondrement du système de santé. De plus, les mesures envisagées par le gouvernement suite à la fin des protestations vont peser sur les associations professionnelles de médecins, et constituent une vraie menace aux droits fondamentaux, tels que le droit à la liberté d'expression, ou à la liberté de s'associer et à la démocratie elle-même, qui est encore jeune en Slovaquie.

L'usage de moyens extrêmes dû aux conditions extrêmes

L'état du secteur de la santé publique en Slovaquie est alarmant et les syndicalistes exprimaient leur désaccord avec cette situation déjà depuis le mois de janvier. En effet, le secteur de la Santé en Slovaquie (6 % du PIB) est nettement sous-financé par rapport à la moyenne européenne (10 % du PIB). Tandis qu'en Allemagne le salaire de départ d'un médecin s'élève à 3700 euros, en Slovaquie il n'est que de 500 euros. De surcroît, les médecins en Allemagne peuvent profiter d'un plus grand nombre de jours de congés. Leurs homologues slovaques disposent d'un équipement technique de qualité inférieure et bien évidemment, leurs conditions du travail et leurs perspectives de promotions ne sont pas plus prometteuses. Malgré cela, Ivan Uhliarik n'a pas montré de volonté de négocier avec des médecins désespérés par leur situation. Ceci les a menés à exprimer leur mécontentement par des actions de plus en plus radicales : en septembre, plus de 2400 médecins ont présenté leur démission.

Un gouvernement ignorant et réticent à négocier

Seul ce geste est parvenu à pousser les autorités politiques à la coopération. Toutefois, les mesures proposées par le gouvernement était trop limitées, voire illusoires, et ne pouvaient donc pas être acceptées par les syndicalistes. Le gouvernement a ensuite, plutôt que de continuer les négociations, décidé de déclarer l'état de crise, qui implique le retour à leurs fonctions de tous les médecins. Sous une telle pression, les associations des médecins ont cédé en faisant preuve de bonne volonté, manifestant ainsi leur désir de trouver des solutions. Elles ont accepté l'accord du gouvernement, au détriment de leurs objectifs initiaux. En effet, les médecins se sont montrés très magnanimes, notamment dans le domaine des salaires. Ils ont accepté une hausse au niveau du salaire moyen multiplié par 1.5 - 2.3, alors qu'initialement ils revendiquaient que leurs salaires montent jusqu'au niveau de salaire moyen multiplié par 3 à l'horizon de 2013.

Un droit fondamental des médecins menacé

Ainsi, le gouvernement a effectué une grande pression sur les médecins même durant leur grève, et les déclarations récentes des autorités font craindre une véritable oppression du groupe professionnel des médecins. C'étaient d'abord les déclarations du 15 décembre du Premier Ministre, I. Radicova, sur la nécessité de la révocation de la direction de LOZ2 qui constituent une intervention considérable dans les droits des organisations syndicales. De plus, le 16 décembre le gouvernement a affirmé sa volonté de limiter le droit de grève des médecins, impliquant des sanctions allant jusqu'à 5 ans de prison ! La crise actuelle dans le secteur de la santé nous révèle à quel point le gouvernement actuel est incompétent, refuse d'aider la population et reste soumis à certains groupes financiers. Les médecins ont essayé de leur faire face, mais ont fini encore plus opprimés. Voici le retour en arrière de la démocratie et les progrès de l'autoritarisme, une fois le gouvernement est dominé par la droite.

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

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