Le Luxembourg sous le feu des critiques

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Les récentes révélations de la presse internationale sur les pratiques d'optimisation fiscale ayant bénéficié à une multitude d'entreprises internationales ont ébranlé le Grand-Duché. À tort ou à raison ?

Le Luxembourg pris pour bouc émissaire

29/12/2014 - 17:30
La mise en lumière des pratiques d’optimisation fiscale au Luxembourg a quelque peu déstabilisé le Grand-Duché, néanmoins les attaques dont il fait l’objet ne sont pas justifiées.

C'est une véritable bombe médiatique qui a explosé le 6 novembre dernier au Luxembourg. Le Consortium international de journalistes d'investigation (ICIJ), a dévoilé un important dossier sur les « rulings », constructions fiscales complexes permettant aux entreprises multinationales de réduire le montant des impôts sur les bénéfices. Selon les révélations de la presse internationale, le Luxembourg a excellé dans cet exercice, car pas moins de 340 multinationales auraient profité de ce système. L'ensemble de l'enquête a été baptisée «LuxLeaks». L’événement a été révélé par le directeur de PricewaterhouseCoopers (PwC) Luxembourg dans une conférence de presse le 6 novembre dernier. Il précise que les informations, couvrant la période 2002 à 2010 et appartenant au cabinet, ont été dérobées grâce à l’exploitation d’une faille dans le système de sécurité informatique. Une plainte avait été déposée en mai 2012. Ces documents, d’un volume total de 28 000 pages, et dont une copie a été obtenue par le ICIJ, détaille les pratiques de tax ruling (ou accords fiscaux anticipés) exercées le Luxembourg.

 

Une pratique légale et fréquente en Europe

Ce qui apparaît de prime abord comme un « gros mot » est en réalité une pratique tout à fait légale. Plus précisément, le « tax ruling » permet à une entreprise donnée, souvent via une entreprise spécialisée, d’anticiper la façon dont sa situation sera traitée par l’administration fiscale d’un pays et d’obtenir certaines garanties juridiques. Cela lui permet de faire des choix sur la répartition de ses bénéfices imposables et de d’optimiser ainsi sa fiscalité. La légalité des décisions prises est alors validée par l’administration fiscale du Luxembourg.
Visiblement pris au dépourvu, le gouvernement luxembourgeois a eu au départ du mal à organiser sa défense. Néanmoins, le Premier ministre, Xavier Bettel, et le ministre des Finances, Pierre Gramegna, ont argué de la légalité de cette pratique. Celle-ci est en effet tout à fait compatible avec les standards communautaires et ceux de l'Organisation de coopération et de développement économiques (l’OCDE), laquelle, rappelons-le, a notamment pour objectif de lutter toute tentative de mauvais usage de l'optimisation fiscale de la part des entreprises multinationales. Précisons que le tax ruling n’est pas propre qu’au Luxembourg : d’autres Etats membres de l’Union européenne, comme la Grande-Bretagne, sont plus que familiers de cette pratique. Les accusations selon lesquelles la politique du Grand-Duché irait à l’encontre d’une solidarité fiscale avec les autres Etats membres est donc à relativiser. « Je ne sais pas si le Luxembourg aurait été traité de la même manière si nous avions été un grand pays » a remarqué Xavier Bettel.
Reste la question de la transparence, ces accords d’optimisation fiscale ayant en effet peu fait l’objet de publicité auprès des administrations des autres Etats membres. A cette critique, le gouvernement luxembourgeois rappelle avec raison que ces derniers mois d'importants pas en avant ont été réalisés, notamment avec le feu vert à l'échange automatique d'informations sur les avoirs des clients bancaires non-résidents. Le secret bancaire fait donc désormais partie du passé au Grand-Duché, même si des efforts restent à faire pour que tombe l’image du Luxembourg comme d’un paradis fiscal.


Une attaque dissimulée contre la Commission Juncker ?

On pourrait enfin s’étonner que cette affaire arrive quelques jours seulement après la prise de fonctions de la Commission de Jean-Claude Juncker, ancien Premier ministre luxembourgeois, président de l’Eurogroupe pendant 8 ans. Ses détracteurs lui reprochent en effet d’avoir été le grand architecte de l’optimisation fiscale du Grand-Duché. Les critiques, plus virulentes les unes que les autres, semblent avoir avant tout pour objet de le mettre à mal suite à son accession à la présidence de la Commission. Le choix d’un président de la Commission à la forte personnalité a en effet de quoi déranger les grands pays membres de l’Union européenne. Les journalistes ayant révélé l’affaire parlent de pur hasard du calendrier, mais on peut douter de la sincérité de leur réponse. En effet, Jean-Claude Juncker aura dû faire face à une motion de censure du Parlement suite à ces événements. Même si celle-ci avait peu de chances d’aboutir, cette affaire ne peut que laisser un goût amer.


Quoi qu’il en soit, le Luxembourg est déterminé à faire la lumière sur les origines de ces affaires. On rappellera pour finir que ces pratiques concernent un passé auquel le nouveau gouvernement luxembourgeois a choisi de tourner le dos en œuvrant pour plus de transparence. La communication sur ces réformes sera également l’un des principaux défis pour le Gouvernement luxembourgeois et la Commission européenne dans les mois à venir.

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

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