La rupture entre les Le Pen, véritable scission ou simple manœuvre politique ?
Cette mise à l'écart révèle-t-elle une véritable scission idéologique, ou n'est-elle qu'une manœuvre en vue de dé-diaboliser le parti ?
Une véritable scission au sein du parti
Précarisation, isolement social, exploitation… le citoyen français de 2015 supporte tous les maux, mais refuse d’être dupe. La théorie du complot, cuisinée à toutes les sauces depuis 2001, emporte tout sur son passage et signe la chute de l’esprit critique et le discernement, pour qui se prétend précisément plus averti que les autres. La course au cynisme n’est pas indifférente au cas du Front National, et souligne le jeu de marionnettes qui se joue entre Hénin-Beaumont et Saint-Cloud. L’hypothèse est séduisante pour le citoyen moyen et humaniste moyen de la classe moyenne toujours prêt à tirer à boulets rouges sur le parti d’extrême-droite français. Et pourtant…
Les médias jouent leur rôle
Contrôlant l’opinion, la formant et l’orientant (qui le niera ?), les médias ont trouvé un nouveau jouet avec le Front National. Qu’il s’agisse de ceux qui dopent leurs audiences en laissant la parole au parti frontiste (BFM TV) ou ceux qui s’évertuent à le dénoncer (Canal +), le sujet fait recette. La poule aux œufs d’or permet à certains médias de trouver un électorat dénonçant un « système » qu’il ne parvient pas à nommer, et à d’autres de trouver une base de fidèles en quête de bonne conscience et peu perméable aux difficultés que connaît le pays. La construction médiatique est alléchante et tourne à plein régime : surfant sur la réussite du décryptage politique (réussi) et du journalisme d’investigation salvateur dont sont adeptes respectivement le Petit Journal et Mediapart, un amalgame est fait entre l’information vérifiée et documentée, et l’appel au complot autour du jeu de dupes des Le Pen.
Le parti a besoin de se doter d’une image respectable
Une attitude plus rationnelle permet d’entrevoir les faiblesses de l’argumentaire médiatique, repris en chœur par une partie des citoyens : le Front National n’a aucun besoin de dissensions, ni de mettre Jean-Marie le Pen au pas. L’électorat frontiste n’est majoritairement pas âgé, islamophobe et pétainiste : il est jeune, inquiet et peine à s’insérer dans la vie active (le FN est le premier parti des jeunes). Les rares soutiens de Jean-Marie le Pen vont au contraire quitter le navire et coûter quelques voix au parti de sa fille. Vous dites que la mise à l’écart permet d’achever la stratégie de dédiabolisation du FN et de rallier un électorat d’extrême gauche ? Que certains électeurs n’auront plus honte de voter FN ? On vous rappelle que le vote secret existe depuis 1795. Et pour une véritable rupture, un changement de nom aurait pu suffire – lequel interviendra très certainement d’ici 2017. L’épisode a au contraire été une nouvelle occasion de rappeler le passé et l’idéologie du parti sous Jean-Marie le Pen. En quête d’un nouvel ordre, l’électorat frontiste n’attend pas une guerre interne au sein du parti qu’il soutient. C’est tout l’inverse : le FN est souvent pointé du doigt comme étant inexpérimenté – ses rares expériences municipales s’étant soldé par des échecs dans les années 1990. Pour gagner en crédibilité et apparaître présidentiable, il a surtout besoin d’un exécutif fort, pas de réunions familiales houleuses.
Le poids dans l’Union Européenne
En poussant la logique complotiste jusqu’au bout, on aurait pu imaginer que Jean-Marie le Pen allait se retirer de la vie politique et laisser l’espace à sa fille pour rassembler les tendances nationalistes et contestatrices. Pourtant, il a annoncé sa volonté de créer une formation politique dissidente du FN, risquant ainsi de faire éclater la délégation frontiste au Parlement Européen – seul espace où le Front National peut revendiquer une véritable légitimité démocratique, une fois débarrassé du scrutin français antidémocratique car non-proportionnel. Le risque est électoral et financier pour le Front National : il peine à construire un groupe parlementaire à Strasbourg (25 députés issus de 7 pays de l’UE sont nécessaires), ce qui lui permettrait pourtant de peser politiquement et obtenir des financements supplémentaires. Tout espoir est à présent anéanti s’il n’existe aucun accord entre les fidèles du père (Arnautu) et de la fille (Philippot, Aliot…).
Ainsi, il semblerait que la confrontation entre Marine le Pen et Jean-Marie le Pen puisse bien être une façade pour mieux préparer 2017…si l’on fait abstraction du risque politique, financier, électoral que cela implique. Une piètre stratégie politique qui ne valait pas la peine de monter tout un scénario…
Dieser Artikel präsentiert bewusst nur eine der zahlreichen, divergierenden Meinungen zu diesem kontroversen Thema. Sein Inhalt entspricht nicht zwingendermaßen der persönlichen Meinung seines Verfassers. Bitte sehen Sie hierzu Die Philosophie von Duel Amical.
Une rupture de façade
Pourtant, force est de constater que l’idéologie du Front national n’a guère changé et qu’il ne s’agit que d’une rupture de façade.
Si évolution il y a, elle porte sur la cible des attaques du parti. Le discours est en effet double. D’un côté les responsables condamnent devant la presse les attaques antisémites telles que la profanation du cimetière juif de Sarre-Union en 2015. La rupture affichée avec Jean-Marie Le Pen est effectivement assez emblématique de cette évolution. Mais de l’autre, le parti continue à affirmer que les aides financières étrangères pour la construction de mosquées en France constituent « une menace certaine pour la sécurité nationale » (communiqué du mois d’avril 2015). Cet exemple est assez représentatif du discours actuel du parti, qui tend à faire un amalgame entre les musulmans et les mouvements djihadistes. Marine Le Pen joue ainsi sur les peurs actuelles liées au terrorisme et à l’insécurité en stigmatisant une communauté. En 2002 Jean-Marie Le Pen avait usé d’arguments similaires.
Un discours qui reste résolument xénophobe
Les apparences sont également trompeuses vis-à-vis de la place accordée aux étrangers. D’un côté Marine Le Pen se dit bouleversée par les morts tragiques d’immigrés clandestins en Méditerranée. De l’autre, elle reste particulièrement ferme sur la place à accorder aux étrangers en France. Comme son père, elle reste très stricte sur les entrées sur le territoire et les conditions d’accès à la nationalité.
En revanche, le discours sur la situation des étrangers sur le territoire français n’a pas changé : une affiche de campagne du parti titrait en 1978 « Un million de chômeurs, c'est un million d'immigrés en trop. Les Français d'abord ». Cette formule est-elle si différente de la préférence nationale si ardemment défendue par Marine Le Pen ? Assurément pas. Le Front national, aujourd’hui encore, souhaite ainsi inciter les entreprises à prioriser l’emploi des personnes ayant la nationalité française.
Enfin, comme son père, et comme sa nièce Marion Maréchal-Le Pen, Marine Le Pen sous-entend que certains Français le seraient moins que d’autres. Elle s’attaque notamment aux binationaux, en militant pour la déchéance de leur nationalité en cas de condamnation pour des faits délictuels ou criminels, ou en déclarant en 2012 que les voix ayant manqué à Nicolas Sarkozy à la présidentielle étaient celles des Français naturalisés.
Un décalage entre le discours médiatique et la base militante
Au-delà de la question idéologique, le comportement même de la présidente du FN pose question. En effet, en parcourant les témoignages de militants ou anciens militants du parti, force est de constater qu’il demeure une différence significative entre le discours face aux médias et envers les militants, tout comme le comportement de ces derniers. Les différents témoignages relayés par RTL, Le Monde ou le Nouvel Observateur, pour ne citer qu’eux, sont assez révélateurs. Il s’agit dans chaque cas de personnes ayant quitté les partis traditionnels pour se ranger sous la bannière du Front national, et qui se trouvent confrontés à un discours particulièrement xénophobe, anti-islam, voire homophobe et antisémite. Malgré les alertes au secrétariat national, les personnes porteuses de ces idées radicales ne sont que rarement désavouées. Une attitude qui contraste singulièrement avec les condamnations apparemment sans appel de Marine Le Pen. Cécile Alduy, co-auteur de Marine Le Pen prise aux mots souligne ainsi que le but de la dirigeante du Front national reste de maintenir une identité publique, modérée et qui permet d’élargir son audience, avec une identité radicale.
Un clash stratégique en réponse aux attaques des partis traditionnels
Enfin, on notera que le clash provoqué par Marine Le Pen semble arriver à point nommé. Il intervient en effet peu après les attaques frontales menées tant par l’UMP de Nicolas Sarkozy que par le PS, visant justement les aspects les plus radicaux du Front national. En se distançant de son père, Marine Le Pen coupe l’herbe sous le pied à ses détracteurs qui se retrouvent ainsi le bec dans l’eau. La normalisation du Front national permet à Marine Le Pen de se poser en alternative à des partis de gouvernements minés par les échecs au pouvoir et secoués par des scandales politico-financiers. Cette stratégie de renvoi dos-à-dos de l’UMP du PS et de l’UMP n’est, elle non plus, pas nouvelle. La question est à présent de savoir dans quelle mesure ces partis se rendront compte de la supercherie pour y réagir de façon adéquate.
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Kommentare
Véritable scission,…
Véritable scission, confirmée par le fait que les 4 parlementaires FN incarnent exactement les 4 états confédérés dont parlait Maurras ! Les protestants (Maréchal), les juifs (Rachline), les francs-maçons (Collard) et les "métèques" (Sanchez).
Marine Le Pen est démocrate et républicaine, totalement inféodée au système.
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