Le processus d'élaboration de la nouvelle Constitution

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Une nouvelle Constitution a été votée en avril 2011. Selon la droite, le pays dispose enfin d’une Constitution digne qui, jusqu’alors, était gouverné d’après une constitution communiste réformée. Les socialistes s’inquiètent pour la démocratie.

La Hongrie est une démocratie

20/09/2011 - 20:25
Après vingt ans de transition démocratique, le Parlement hongrois a adopté une nouvelle Constitution. Ceci pour remplacer l'actuelle loi fondamentale qui datait de l'époque communiste, et ne répondait plus aux nécessités du XXIe siècle.

Le processus constituant qui se déroule actuellement en Hongrie est non seulement nécessaire mais aussi légitime.

La Constitution hongroise en vigueur date de 1949, début du régime communiste antidémocratique. Bien que, lors du changement du régime en 1989, elle ait été largement amendée et puisse désormais être considérée comme démocratique, elle présente plusieurs défauts. Ces failles expliquent la nécessité d'élaborer une nouvelle loi fondamentale.

Une rupture symbolique avec le régime communiste

La Constitution, au lieu d’être le symbole de la rupture avec l’ancien régime communiste, incarne une continuité avec ce dernier. Même si, en 1989, elle est le fruit de négociations entre les cadres communistes et les forces de l’opposition, elle ne peut pas être considérée comme un compromis strictement démocratique, aucun acteur politique ayant participé à son élaboration n'ayant été élu démocratiquement. D’ailleurs, à l’époque, ce défaut était reconnu implicitement par les constituants. Ils considéraient en effet que la Constitution de 1989 qui n’était que la version abrogée de loi fondamentale communiste était provisoire, donc susceptible d’être remplacée dans le futur par une Constitution issue d’un parlement démocratiquement élu. Puisque depuis le changement du régime, aucune majorité parlementaire n’a disposé des deux tiers des sièges, et que le consensus sur le sujet paraissait impossible, la nouvelle Constitution n'a pu être élaborée pendant les deux dernières décennies. Phénomène rare dans l’histoire d’un pays, au printemps 2010 les électeurs ont attribué une majorité des deux tiers au Fidesz-KDNP, l’alliance des deux partis conservateurs du centre-droite. Si un parlement disposant de cette capacité exceptionnelle n’entamait pas le processus constituant, la Constitution provisoire serait demeurée inchangée pour les décennies à venir.

Pál Schmitt, le Président de la République hongroise - Il est content.

Qu'est-ce que la Nation hongroise?

Il est clair que la Constitution actuelle ne répond pas aux nécessités de la Hongrie du XXIe siècle. Par exemple, elle ne définit pas clairement l’identité de la nation hongroise. Ce dernier sujet est crucial puisque depuis Traité de Trianon, qui a marqué la fin de la Première Guerre mondiale, plusieurs millions de Hongrois se retrouvent au-delà des frontières de la Hongrie. Jusqu’à présent, l’état juridique de ces Hongrois vivant dans les pays voisins restait indéfini. La nouvelle Constitution devrait permettre de résoudre ce problème une bonne fois pour toutes en les reconnaissant comme partie intégrante de la Nation Hongroise. La nouvelle Constitution peut également servir pour résoudre des questions plus pratiques. La Hongrie s'est fortement endettée à cause de la politique économique irréfléchie des gouvernements précédents et connaît ainsi d’une crise importante. Pour prévenir un tel endettement dans le futur, la nouvelle Constitution devrait établir une limite pour la dette publique, comme le fait également la Constitution polonaise.

Le Parlement hongrois, doté du pouvoir constitutionnel

Finalement, le processus constituant se légitime par une majorité parlementaire qui jouit d’un soutien populaire extraordinaire. Ce soutien se reflète non seulement dans les résultats des sondages d’intentions de vote, mais aussi dans ceux des élections législatives du printemps 2010 et municipales d’automne 2010. Il ne faut pas oublier que les partis d'opposition ont la possibilité de participer au processus constituant. Ils le peuvent notamment en présentant leurs propositions ou amendements aux comités, ou encore durant les débats parlementaires. Si deux des trois partis d'opposition ont décidé de ne pas y participer, c’est parce qu’ils ne souhaitent pas coopérer ou qu'ils ont choisi cette stratégie pour compromettre le gouvernement.

 

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

Encore une Constitution unipartite?

Auteur
20/09/2011 - 14:25
La majorité gouvernementale du Parlement hongrois vient d'adopter une nouvelle Constitution par un processus illégitime, sans prendre en compte l'opinion de l'opposition. Cette dernière craint des dérives autoritaires.

Concernant la nouvelle Constitution hongroise, plusieurs questions ont été formulées non seulement par l’opposition, mais aussi par des syndicats et des experts. Une majorité de 2/3 au Parlement suffit-elle pour légitimer la nouvelle Constitution ? L’adoption d’une nouvelle Constitution est-elle une véritable nécessité ?

Légiférer sans délibérer

Selon l’ancienne Constitution, l’adoption d’une nouvelle loi fondamentale nécessite une majorité parlementaire des 2/3. Les constituants de 1989 supposaient qu’une telle majorité ne pourrait être atteinte qu’avec le consentement de l’opposition. Toutefois, aujourd’hui, le gouvernement possède à lui seul cette majorité, ce qui lui permet d’adopter une nouvelle Constitution sans coopérer avec l’opposition. Autrement dit, étant donné que le gouvernement se confond avec la majorité des 2/3, le rôle constituant est joué par le pouvoir exécutif, et non par le pouvoir législatif, ce qui met en question la séparation des pouvoirs.

Ainsi, lors du processus constituant, la majorité des 2/3 possédée par le gouvernement ne représente qu’une légitimité juridique, pendant que sa légitimité morale, sociale et politique est bien contestable.

Ce manque de légitimité se manifeste tout d’abord par l’absence des partis de gauche dans le comité constituant. Alors que le gouvernement accuse le MSZP (Parti Socialiste Hongrois) et le LMP (« La Politique peut être différente », Parti Vert Hongrois) d’irresponsabilité politique pour avoir boycotté le processus constituant, l’opposition justifie sa passivité par le fait que lors des débats préparatoires qui ont précédé le véritable processus constituant, le FIDESZ-KDNP (l'alliance de deux partis du centre-droite au gouvernement) n’a pris en considération aucune de leurs initiatives. Ainsi ils ne souhaitent plus assister à l’adoption d’une Constitution élaborée par un seul pouvoir politique. A part le Jobbik (« Le Meilleur » ou « Le Plus à Droite », parti de l’extrême droite en Hongrie), Katalin Szili a été la seule, en tant que femme politique indépendante, à participer à l’Assemblée Constituante. Toutefois, mȇme Mme Szili a voté contre la Constitution, la considérant comme inacceptable.

L'opposition, les experts : tout le monde critique ce processus

Les partis de gauche n'ont pas été les seuls à être exclus du processus constituant : plusieurs syndicats ont affirmé que le Parlement élaborait des articles et prenait des décisions sans demander leur avis.

La légitimité de la nouvelle Constitution peut être contestée également du point de vue social. Le gouvernement étant convaincu qu’une nouvelle Constitution était absolument nécessaire et indispensable, aucun référendum sur cette question n’a eu lieu, et ce en dépit des demandes de l’opposition et de plusieurs organisations civiles. Selon le FIDESZ-KDNP, une seule question, à laquelle il n’y a que deux réponses possibles (OUI/NON), est trop limitée et prive les citoyens de la possibilité d’exprimer leur avis. Dans cette optique, un questionnaire portant sur la Constitution a été envoyé à chaque électeur. Mais dans ce questionnaire il a été « ommis » d'interroger sur la nécessité même de cette loi fondamentale. Ainsi, la réponse « non » était de facto exclue.

Selon le gouvernement cette « consultation nationale » est bien plus démocratique qu’un référendum, permettant aux citoyens de contribuer personnellement à l’élaboration du texte. Pour mettre cela en évidence, le comité constituant a, entre autres, éliminé l’article selon lequel les femmes ayant des enfants mineurs pourraient obtenir un vote supplémentaire aux élections. Cette proposition était fortement critiquée par l’opposition ainsi que des experts bien avant la consultation populaire, si bien que son rejet par le peuple n’est guère surprenant. La question se pose de savoir si cette idée absurde sur le vote supplémentaire n’était pas seulement un instrument dans les mains de la droite, qu’elle a utilisé pour détourner l’attention d’autres questions bien plus importantes (comme par exemple la limitation de la marge de manœuvre de la Cour constitutionnelle).

Quoi qu'il en soit, cette consultation nationale ne légitime pas à elle seule la Constitution, car sur huit millions de questionnaires, moins d’un million ont été retournés. De plus, l’analyse des résultats a été faite d’une façon peu transparente, et il ne faut pas oublier non plus que ce questionnaire, contrairement à un référendum, n’a pas d’effet contraignant sur le Parlement.

Nécessité d'une Constitution que chaque citoyen pourrait considérer comme sienne

Même si la Constitution actuelle n’est que provisoire, la Hongrie a fonctionné démocratiquement pendant plus de vingt ans. Pourtant, les critiques majeures ne se concentrent pas sur la question de nécessité, mais plutôt sur celle de légitimité. Il est vrai que la loi fondamentale de 1989 /ignore certains enjeux contemporains, et pour cette raison elle doit être mise à jour. Toutefois, pour qu’elle puisse appartenir à chaque citoyen, elle devrait jouir d'une légitimité plus large et elle aurait dû être le résultat d’une collaboration entre le gouvernement, les partis d’opposition et les syndicats.

 

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

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